Civic’ Act

Dans le cadre du projet Politiques de la Terre et en collaboration avec Sciences Po (CEVIPOF), poursuivant des recherches menées sur l’environnementalisme civique (Blanc et Emelianoff, 2008 ; Fisher et al., 2012), le projet de recherche action CIVIC’ACT vise à analyser et à développer une cartographie de l’activisme environnemental en région Ile-de-France. Il s’agit d’interroger la façon dont les activismes locaux reconfigurent les manières dont les citoyens veulent vivre et selon quels objectifs, tout en analysant leurs contributions concrètes aux territoires.

L’« activisme environnemental » s’est emparé de pratiques et d’espaces d’action spontanés qui viennent redessiner les contours de la citoyenneté et de la façon d’habiter les territoires. Ces projets, dont beaucoup relèvent de l’économie sociale et solidaire, semblent montrer que d’autres systèmes de partage et de coexistence peuvent se développer, notamment à des échelles locales et, de plus en plus souvent, grâce aux technologies du numérique (Cardon, 2010). Le numérique nous donne paradoxalement l’occasion de reconsidérer le projet de société collaborative afin de bâtir demain une société des « communs », bien au-delà des seules dimensions économique et financière. Contre les plateformes de ladite économie du partage, qui n’en a que le nom et semble plutôt une sorte d’économie « au compteur », le « coopérativisme de plateforme »[1] œuvre dans le sens d’une société collaborative, solidaire et sociale.

Méthode 

En termes de méthode, nous avons constitué une base de données regroupant les associations environnementales des 131 communes du Grand Paris à partir de la liste d’associations Loi 1901 fournie par la Direction de l’Information Légale et Administrative (DILA). Nous l’avons complétée en créant des partenariats avec des organisations locales pour collecter des données sur les collectifs et associations avec lesquels ils travaillent[2]. Après avoir combiné les bases de données des partenaires pour créer une population d’enquête, nous avons nettoyé et délimité la base de données pour échantillonner.

Cette démarche a abouti à un échantillon de 753 associations recensées, auxquelles nous avons diffusé un questionnaire en ligne à propos de leurs ressources, pratiques, réseaux et terrains d’action, complété dans un second temps par une série d’entretiens. Afin de sélectionner les associations avec lesquelles nous entretenir, nous avons mis en place avec des politologues et géomaticiens du CEVIPOF un échantillonnage de 31 communes représentatives du Grand Paris en termes d’occupation du sol. Au sein de ces communes, nous avons systématiquement contacté l’ensemble des associations environnementales de la commune ou arrondissement, avec qui nous avons effectué un entretien semi-directif avec un membre actif. Ce dispositif nous a permis d’avoir accès à un échantillon d’acteurs diversifiés et notamment à des groupes plus marginalisés au sein de la nébuleuse associative environnementale.

Parallèlement, nous développons une analyse explicative de la dynamique associative sur ces territoires en prenant en compte plusieurs facteurs externes.

L’Indice de défaveur social est un indice adaptable à l’espace urbain Français qui définit la défaveur socioéconomique globale aux multiples dimensions: revenu médian par unité de consommation, part des diplômés ayant au moins le baccalauréat, part des ouvriers dans la population active, taux de chômage.

La base MOS (Mode d’Occupation des Sols  MOS de 82 à 11 classes) a permis de dessiner les modes d’occupation des sols (incluant les différences entre friches et espaces verts), et leurs rapports aux mobilisations associatives environnementalistes (présence/absence et nombre).

Les élections et la base de données  électorales en Ile de France selon 3 « cycles » d’élection (2001 à 2004 : municipales 2001, présidentielle et législatives 2002, européennes 2004, régionales 2004 ; 2007 à 2010 : présidentielle et législatives 2007, européennes 2009, municipales 2008, régionales 2010 ; 2012-2015 : présidentielle et législatives 2012, européennes 2014, municipales 2014, régionales 2015) en lien avec les mobilisations associatives environnementalistes (présence/absence et nombre) dessinent une cartographie de la vie politique entre un engagement dans des collectifs et le vote aux élections.

Un score composite intégrant 3 dimensions d’inégalités, agrégeant le statut socio-économique, l’exposition aux pollutions (l’exposition aux métaux lourds Cd, Ni, Cr, et Pb,  la proximité aux industries polluantes (simple : absence/présence ; complexe : « buffer » prenant en compte les émissions), l’accès aux aménités environnementales (espaces verts, parcs, jardins collectifs, espaces végétalisés…etc.,) a permis d’identifier les zones cumulant défaveur environnementale (cumul d’expositions environnementales et carence en aménités environnementales) et défaveur sociale

Opérant de la sorte, nous mettions en relation des données quantitatives (base de données variées) et des données qualitatives constituées à partir d’entretiens et d’observations localisées dans différents territoires du Grand Paris. L’effort consiste alors à mettre au point une méthodologie qui crédibilise la mise en relation de différents types de données, en accord avec le Programme de recherche de Politiques de la Terre.

Nos questions concernent la présence des associations sur ces territoires. Quels sont les effets de contexte sur leur activité ? Quelle est l’influence relative des facteurs environnementaux et socio-économiques à l’échelle locale à différents niveaux dans l’élaboration des résultats obtenus par ces groupes et réseaux et dans leurs processus de gouvernance en interne et vis-à-vis de leur environnement ? Comment les différences socio-géographiques entre les territoires ont-elles une incidence sur les capacités des groupes civiques à mettre en œuvre leurs objectifs et à transformer les territoires?

[1] « Vers des plateformes réellement coopératives », Hubert Guillaud, Internet Actu, 1er janvier 2016 : http://internetactu.blog.lemonde.fr/2016/01/01/plateformescooperatives/

[2] Nous avons obtenu les listes de contacts de sept pourvoyeurs de données : Environnement 92, Estivales de la Permaculture, France Nature Environnement, les Grands Voisins, NatureParif, RéFé, ZeroWaste.